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Manolis Glezos, résistant * Μανώλης Γλέζος

Manolis Glezos rendant hommage aux victimes de l'Université d'Athènes Polytechneio
(photo IntimeNews/Στέλιος Στεφάνου)

 

     Manolis Glezos (Εμμανουήλ Γλέζος) naquit à Naxos (Apiranthos Απείρανθος) le 9 septembre 1922. Il fut un journaliste et écrivain engagé.
Toute sa vie son implication politique à gauche le mit en danger, il connut ainsi trois condamnations à mort, neuf tentatives d'assassinat et subit à plusieurs reprises la détention (16 ans au total). En surmontant ces situations extrêmes, il est devenu un héros politique en Grèce. Il est mort à 97 ans le 30 mars 2020.

Son père Nikolaos, journaliste et fonctionnaire mourut alors que Manolis n'avait que deux ans. Sa mère, Andromaque Nafpliotou (Ανδρομάχη Ναυπλιώτου), originaire de Paros, l'éduqua à Naxos jusqu'en 1935, date à laquelle la famille partit pour Athènes. Manolis poursuivit alors ses études en économie tout en étant employé en pharmacie.

Il s'impliqua politiquement assez tôt en intégrant en 1939, à 17 ans, un groupe anti-fasciste qui luttait contre l'occupation du Dodécanèse par les Italiens et contre la dictature de Ioánnis Metaxás en place depuis 1936.
Les nazis venaient à peine d'arriver à Athènes (27 avril 1941) lorsqu'il retira le drapeau nazi de l'Acropole
aux côtés d'Apostolos Santas, dans la nuit du 30 au 31 mai 1941. Ce premier acte de résistance en Grèce (et en Europe selon De Gaulle) lui valut sa première condamnation à mort par contumace par les Nazis qui l'arrêtèrent un an plus tard, le 24 mars 1942 et le torturèrent dans la prison Averoff d'Athènes. Il fut libéré au bout d'un mois car il souffrait d'une tuberculose qui s'est ensuite résorbée.

 Voici le témoignage de cette nuit du 30 au 31 mai 1941 par Manolis Glezos et Apostolos Santas dans le documentaire de Bernard Georges, «Les combattants de l'ombre» (2011) :

 

Vidéo : s dornac


Manolis Glezos s'était engagé aux côtés des résistants communistes dans la ligue communiste de la jeunesse (OKNE) et à l'organisation panhellénique unie de la jeunesse (EPON). Il fut arrêté par les occupants italiens le 21 avril 1943 et enfermé trois mois en prison. Presqu'un an plus tard,
à la suite d'une dénonciation, il fut emprisonné  du 7 février 1944 au 21 septembre, date à laquelle il s'échappa de prison.
Pendant toute la durée de l'Occupation, il travaillait pour la Croix Rouge Grecque (1941-1943) et à la municipalité d'Athènes (1943-1945). 1945 est l'année où 50 000 partisans de l'EAM furent emprisonnés par la monarchie qui, jusque là, était en exil. Elle est réinvestie de son pouvoir par les britanniques (17 octobre 1944), à la veille de la guerre civile grecque (1946-1949) qui opposa les anciens résistants communistes de l'EAM-ELAS au pouvoir monarchique de Georges II, puis de Paul 1er, soutenus par Churchill.

Jusqu'en 1947, Manolis Glezos travailla comme rédacteur en chef pour le journal communiste Rizopastis (Ριζοσπάστης qui existe encore aujourd'hui). Le parti communiste fut alors interdit jusqu'en 1974.
Cet engagement politique aux côtés des communistes dans la guerre civile grecque lui valut d'être emprisonné le 3 mars 1948 et d'être condamné à mort en 1949 comme l'explique cette interview (les-crises.fr): En 1949, Manolis Glezos est condamné à mort pour trahison. Un dirigeant grec l’annonce à une presse incrédule, en leur affirmant que sa tombe est déjà prête. « Ma mère est allée voir mon tombeau », explique-t-il. Il se souvient de la radio grecque diffusant, le dimanche après sa condamnation, un extrait de la radio française, qui annonce : « Le général de Gaulle s’adresse au gouvernement grec pour qu’il n’exécute pas le premier résistant d’Europe. »
«Dans mon village, sur l’île de Naxos, tout le monde a signé en ma faveur, même le pope. Et ils n’étaient pas tous communistes ».
Ce sont donc les interventions des Grecs et des célébrités étrangères comme Picasso ou Charles de Gaulle qui lui permirent en 1950 de commuer sa peine en emprisonnement à perpétuité. Il est libéré le 16 juillet 1954 après avoir été élu depuis sa prison membre du Parlement (1951) et après avoir fait une grève de la faim de 12 jours.

 

Manolis Glezos, résistant * Μανώλης Γλέζος

   

Manolis Glezos, résistant * Μανώλης Γλέζος

Manolis Glezos (à droite) et Apostolos Santas

 

 En 1956, il prit la direction du journal I Avghi (Η Αυγή - l'Aube) dans une Grèce encore très prisonnière de la guerre froide. Aussi, il fut accusé d'espionnage et emprisonné en 1958 par le gouvernement de droite de Konstantínos Karamanlís. À nouveau, l'opinion internationale s'émut, les Russes lui donnèrent le Prix Lénine pour la paix en 1962 et on le libéra cette année-là.

 

 Vidéo : British Pathé 

Manolis Glezos reçoit le prix à Moscou (diffusé en 1963)

 

Il avait été élu député d'Athènes depuis sa prison en 1961 sous la bannière de l'Union Démocratique de gauche (EDA- Ε.Δ.Α., Ενιαία Δημοκρατική Αριστερά) qui était une reconstitution cachée et légalisée du parti communiste grec (KKE) interdit depuis 1947. Parmi les membres de l'EDA, on pouvait trouver également Grigóris Lambrákis, élu député en 1961 au Pirée et assassiné en mai 1963 à Thessalonique. Cet assassinat est le sujet du roman de Vassilis Vassilikos (1966) et du film «de Costa Gavras (1969) où Charles Denner incarne Manolis Glezos. Le poète Yánnis Rítsos et le compositeur Míkis Theodorákis en faisaient également partie.

 

Bande-annonce du film «Z» de Costa Gavras
Vidéo : VegetativeHorse

 

 À la suite du coup d'État des colonels en 1967, Manolis Glezos fut à nouveau arrêté chez lui rue Faidriadon dans le quartier de Kipseli où il demeurait avec sa famille. Il connut les différentes prisons grecques et exils sur les îles et fut finalement bénéficiaire d'une amnistie générale en 1971.
Ses activités politiques consistèrent ensuite à reconstruire l'EDA dont il fut le secrétaire. Mais en 1968, il condamna l'invasion soviétique de la Tchécoslovaquie, rompant ainsi ses liens avec les communistes.

 

Interview de Manolis Glezos au moment de la chute de la Junte (13 octobre 1974):

 

Vidéo : AP Archives

 

Il participa à certaines élections aux côtés du parti socialiste grec (PASOK) dans les années 1980 et fut élu euro-député pour la première fois en 1984.

En 1986, il revint dans sa ville natale d'Apirathos se faire élire maire pour expérimenter la démocratie directe, une situation unique où il « abolit les privilèges du conseil, introduisit une « constitution » et mit en place une assemblée locale qui avait le contrôle total sur l'administration de la commune. Ce modèle fonctionna pendant plusieurs années, mais l'intérêt de la population diminua et l'assemblée fut abandonnée.» (wikipedia). Il resta cependant président du conseil municipal jusqu'en 1989. En 2002 il forma une coalition avec la gauche pour soutenir sa candidature comme préfet d'Athènes.

Ses engagements récents ont été tout aussi courageux et il en a payé les frais : pendant l'une des nombreuses manifestations contre le l'austérité, sous le gouvernement socialiste de Giórgos Papandréou (PASOK), il fut gazé par des policiers comme le montrent ces images du 5 mars 2010 :

 

Manolis Glezos, résistant

Photo :  syn.gr

 

Manolis Glezos, résistant

 Un policier gaze sans scrupules un monument de sa propre histoire âgé de 88 ans.

 

Manolis Glezos, résistant

 

Croyez-vous que cela l'a découragé ? S'est-il reposé ? Non ! Un appel à protester devant le Parlement a été lancé pour le 12 février 2012, aux côtés de Mikis Theodorakis, qui a rassemblé 80.000 personnes afin de s'opposer au vote des mesures d'austérité. Théodorakis aurait déclaré : «je vais au Parlement pour les regarder dans les yeux, car certains s'apprêtent à voter la mort de la Grèce («Πάω στη Βουλή για τους κοιτάξω στα μάτια, γιατί μερικοί ετοιμάζονται να ψηφίσουν το θάνατο της Ελλάδας», in.gr.)

 

Manolis Glezos, résistant * Μανώλης Γλέζος

Mikis Theodorakis et Manolis Glezos
Photo : Yannis Panagopoulos Γιάννης Παναγόπουλος

 

Manolis Glezos, résistant * Μανώλης Γλέζος

Mikis Thédorakis (photo : in.gr)

 

Afin d'éviter les gaz lacrymogènes, Glezos et Theodorakis ont finalement été emmenés chez le médecin du Parlement.

 

Manolis Glezos au Parlement européen de Strasbourg, sous la bannière du SYRIZA (octobre 2014): 

 

Vidéo :  SYRIZA European Parliament
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  (vous pouvez mettre des sous-titres en cliquant ainsi :  Canulars * φάρσες
          puis en sélectionnant la langue sur la roulette juste à côté)  

 

Son dernier discours au Parlement européen (2015):

 

Vidéo : Tomas Miglierina

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          puis en sélectionnant la langue sur la roulette juste à côté)  

 

Manolis Glezos a été hospitalisé le 17 mars 2020 pour des problèmes gastriques. Il est mort 13 jours plus tard d'une insuffisance cardiaque.

 

Toutes les photos proviennent d'internet  

 

Liens / Links

L'oracle de Naxos (Les-crises.fr, 2012)

Les combattants de l'ombre, documentaire de Bernard Georges avec le témoignage d'Apostolos Santas (à 45'08)

Article du Monde, 30 mars 2020

article de Libération, 30 mars 2020

Manolis Glezos, éternel indigné grec (reportage vidéo de l'AFP en 2012)

Protestations à Prague en 1959 contre l'arrestation de Manolis Glezos (vidéo)

 

En grec :

sansimera (journal grec en ligne)

l'histoire de la descente du drapeau nazi de l'Acropole

Photos de manifestations récentes où Manolis Glezos s'est fait gazer (2010) (syn.gr)

Θεοδωράκης-Γλέζος:Ολοι στο Σύνταγμα να σταματήσουμε την προδοσία

Interview de Manolis Glezos et d'Apostolos Santas (en grec, 1h)

Interview de Manolis Glezos en 2014 (conseils aux jeunes)

Autre interview de Manolis Glezos en 2014 (vidéo, 1h35)

Manolis Glezos pendant la Deuxième guerre mondiale (vidéo de 6' en grec sous-titrée en anglais)

Une interview de Manolis Glezos sur les réparations de la guerre dues à la Grèce  (2014) :

En italien : Brogi.info, un article sur un blog à propos de Manolis Glezos en fevrier 2012.

En russe : reportage intégrale de la venue de Manolis Glezos à Moscou pour recevoir le prix Lénine

 

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I
Kalinichta, Bien sùr que nous retournerons dans le pays que nous aimons. Une amie grecque qui habite à Faliro et qui ne peut retourner à Paros vient de nous écrire, "Dès que tu es dans l'avion, je prends le Blue Star pour Parikia !  Julio ??" Admirable résilience des grecs.<br /> Hélas, bp d'athéniens sont revenus sur l'île pendant le confinement. Les pariens n'aprécient pas.<br /> Je regarde des fichiers de photos, cet après-midi j'étais à Kifiira ...<br /> Ianakis
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I
Beaux commentaires Hélène, merci pour les photos Ilias. "Jamais rien lâché" C'est l'idée juste Hélène et comme le dit Dornac, digne de la mythologie grecque. Antigone n'est jamais loin.<br /> Z, un des seuls films que j'ai vu applaudir debout à sa sortie.<br /> Un bel hommage, oui, près du square Mélima Mercouri face à l'Acropole. Ou ailleurs...<br /> C'est agréable de parler de la Grèce dans une communauté de pensée avec des inconnus en cette période où je ne peux partir mardi comme d'habitude pour fêter la Pâque grecque... et ses festivités païennes !
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H
. Magnifique dossier comme d'habitude, très complet, merci.<br /> J'avais été sidérée de voir Mikis et Manolis gazés sauvagement par la police.<br /> Mikis doit être bien triste d'avoir perdu son vieux compère.<br /> J'espère qu'un bel hommage sera rendu à cet homme qui n'a jamais rien lâché.<br /> Quant à Z je ne me lasse jamais de le revoir, la musique de Théodorakis en accentue tellement le rythme.<br /> kαλό απόγευμα !Ελένη
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I
On n'en attendait pas moins de vous, s'agissant d'un si puissant symbole de la Grèce debout, c'est, comme à l'accoutumée, documenté et le plus complet possible.<br /> Quelques photos de la vie de Glézos, (même bébé !) agrémentent cet article tiré du "Quotidien des rédacteurs" du 31 mars:<br /> "Στιγμές του Μανώλη Γλέζου"
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L
Nous sommes très tristes ici de n'avoir pas pu lui rendre l'hommage qu'il méritait pour cause de grand confinement. J'espère que  nous pourrons<br /> le faire prochainement.  
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