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Lena Platonos : Hypermarché (I) * Υπεραγορά (I)
Dès qu'il s'est agi de religion, la censure dans la chanson en Grèce – où l'orthodoxie est une religion d'État – n'a pas seulement été employée sous la dictature de la Junte des années 1967 à 1974. On en trouve encore la trace dans les années 1990 avec par exemple cette chanson de Lena Platonos issue de l'album Μη μου τους κύκλους τάρατε (1991) dont les paroles étaient tolérées sur la pochette intérieure du disque mais ont été effacées à l'enregistrement pour ne laisser que l'accompagnement musical (Cf à 2 min de la version censurée ci-dessous). La partie censurée correspond à un détournement du Credo de Constantinople (Σύμβολο της Πίστεως) mais c'est surtout une critique ironique de la société de consommation, de la mécanique économique libératrique, du hachoir consommatoire.
La chanson est interprétée par Katérina Kouka, la voix récitative, les paroles et la musique sont de Lena Platonos (version ou le Credo est censuré):
Υπεραγορά (Ι)
Οι τελευταίες γενιές των κοριτσιών των ταμείων
πατάνε τα πλήκτρα των αριθμομηχανών μηχανικά
και οι σκέψεις τους ποιος ξέρει που πετάνε,
σε ποια τοπία σεισμικά, σε ποια ροδοσταχτιά ουτοπία;
Με βλέμμα απλανές βγάζουν απ’ το στόμα τους
άφωνες χάρτινες κραυγές λογαριασμών
Το χρήμα γλιστράει, πως γλιστράει
κι ό,τι γλιστράει σαν τίποτα γλιστράει
μέσα από τα χέρια τους,
χέρια εξουδετερωμένα εργατικά.
Γεμίζουν τις σακούλες με τα είδη των ειδών
οι τελευταίες γενιές των κοριτσιών
ψυχικές προεκτάσεις των ταμείων
πρόδρομοι των κωδικών μηχανισμών.
Τώρα πια ένα απ’ τα κορίτσια αυτά
μέσα απ’ την τσέπη μου, μου διηγείται:
γεννήθηκα Κάρτα με αριθμό Κωδικό
σφραγίδα της Νέας Εποχής
άριστη η σχέση μου με την Εξουσία
το όνομά μου, Αναστασία
χαμόγελο αγγελικό, προκαλώ την έλξη.
Και πίσω από τη μάσκα ο άγνωστος Χ
με βυθίζεις μέσα στην τρύπα του υπολογιστή; να η εξυπηρέτηση
π.χ. Χρονική Κάρτα Απεριορίστων Διαδρομών
ο αριθμός της 666*, ξέρεις
πιστεύω στο Χριστιανισμό :
Πιστεύω εις έναν Κωδικό Πατέρα Παντοκράτορα
ποιητήν ουρανού και γης, ορατών τε πάντων και αοράτων
και εις έναν Κύριον Αριθμόν τον Υιόν του Κωδικού τον μονογενή
του εκ του Πατρός γεννηθέντα προ πάντων των αιώνων.
Φως εκ φωτός. Κωδικόν αληθινόν εκ Κωδικού αληθινού
γεννηθέντα ου ποιηθέντα, ομοούσιω τω πατρί δι ου τα πάντα εγένετο.
Τον δι’ ημάς τους ανθρώπους και διά την ημετέραν σωτηρίαν
κατελθόντα εκ των ουρανών και σαρκοθέντα εκ πνεύματος Συμφέροντος
και Απληστίας της Παρθένου και ενανθρωπήσαντα.
Και Σταυρωθέντα επί Ημερών Ενανθρωπήσεως
και παθόντα και ταφέντα εις τους Υπολογιστάς
και αναστάντα την τρίτην ημέρα κατά την Μαζικήν Πληροφόρησιν
και ανελθόντα εις τους ουρανοξύστας
και καθιζόμενον εκ δεξιών του Κωδικού Πατρός
και πάλιν ερχόμενον μετά δόξης
κρίναι ζώντας και νεκρούς
ου της βασιλείας ουκ έσται τέλος.
Και εις την Κάρταν την Αγίαν την Ζωοποιόν
την εκ του Πατρός εκπορευομένην και συνδοξαζομένην
και λαλήσαν δια του Πολιτισμού.
Και εις μίαν Αγίαν Κωδικήν Εξουσίαν
ομολογώ εμβάπτισμα εις τας σχισμάς των Υπολογιστών
προσδοκώ ανάστασιν νεκρών
και ζωήν Κωδικήν του μέλλοντος αιώνος
αμήν, Αναστασία.Supermarché (I)
Les dernières générations de caissières
enfoncent les clés des tiroirs-caisses mécaniques
et qui sait où leurs pensées tombent
dans quel paysage séismique, dans quelle utopie vibromatique ?
Le regard stupéfait, il sort de leur bouche
des hurlements aphones en forme de ticket de caisse
l'argent glisse, comment glisse-t-il
et ce qui glisse comme un rien glisse
à travers leurs mains
de laborieuses mains neutralisées.
Elles remplissent les sacs d'articles spécifiques
les dernières filles de la jeunesse
descendantes spirituelles des caisses
avant-garde des codes-barres informatiques.
Maintenant, l'une de ces nonnes,
de l'intérieur de ma poche, m'entonne :
je suis née Carte-À-Puce avec un Code-Barres
Sceau de la Nouvelle Ère
mon lien avec la Puissance n'est qu'excellence
Anastasia, mon nom
sourire angélique, je provoque l'attraction.
Et derrière le masque, l'inconnu X
tu m'engloutis dans le trou de l'ordinateur ? pour le service avant le Christ
Carte d'Abonnement aux Parcours Infinis
Tu connais le chiffre 666*,
je crois au Christianisme :
Je crois en un Code-Barres Père Tout-puissant
Créateur du ciel et de la terre, de l'univers visible et invisible
Je crois au Numéro Seigneur, fils unique du Code-Barres,
né du Père avant tous les siècles
Lumière, né de la lumière. Vrai Code-Barres né du vrai Code-Barres
engendré non pas créé, de même nature que le Père
et par lui tout a été fait.
Pour nous les hommes et pour notre salut,
il descendit du ciel, par l'esprit d'Intérêt
il a fait chair avec la Cupidité de la Vierge et s'est fait homme
Crucifié pour nous sous l'Incarnation du Jour
et il souffrit et fut mis au tombeau de leurs Ordinateurs
et il ressuscita le troisième jour conformément aux Écritures Informatiques
et il monta aux gratte-ciels
Il s'est assis à la droite du Père Code-Barre
il reviendra dans la gloire
pour juger les vivants et les morts
et son règne n'aura pas de fin
Je crois en la Sainte Carte À Puce qui donne la vie
avec le Père et le fils il reçoit même adoration et même gloire
il a parlé par la Culture.
Je crois en un Puissant Saint Code
Je reconnais un seul baptême dans les fentes des ordinateurs
J'attends la résurrection des morts
et la vie codée du monde à venir
Amen, Anastasia.Traduction personnelle (autres propositions
bienvenues, voir les commentaires)* Lena Platonos joue avec une théorie du complot des années 1970 qui prétendait que le code-barres contenait le chiffre satanique 666: et nul ne pourra rien acheter ni vendre s'il n'est marqué au nom de la Bête ou au chiffre de son nom (Apocalypse, 13:17).
Tableau en tête d'article de Yannis Gaïtis : Paysage humain (le chef), 1977 (photo internet, ab irato)
Γιάννης Γαΐτης : Ανθρώπινα Τοπία (Ο Αρχηγός)Dans la version non censurée, on reconnaît la voix de Lena Platonos qui récite son Credo:
Un spectacle de Lena Platonos en mai 2009, avec une très belle interprétation de Martha Frintzila et Etten au Kyparo:
Orchestration, programming-sound, design, clavier : Stergios Tsirliagos
Guitare: stratos spiliotopoulos
basse: Vlastur
percussions: Tsiko
son: Yannis Paxevanis
lumière: Kostas Margas
vidéo: Maria TheophilouLiens/Links
Sur la chanson (en grec)
Hypermarché II: Υπεραγορά (II) précédé de παραμύθι (conte)
Lena Platonos sur myspace
Lena Platonos, un article de Libération
Yannis Gaïtis (1923-1984): voir aussi l'Index (A à M)Lena Platonos sur ce blog :
Techno grecque poétique (Lena Platonos)
Silencio- Sabotage (Lena Platonos vs David Lynch)
Savina Yannatou chante Lena Platonos
C. Cavafis : En attendant les barbares
C. Cavafis : Cierges
C. Cavafis : Murs
C. Cavafis : Désirs
C. Cavafis : La vitrine du bureau de tabac
Quelques images de Scala Eressos
Les fleurs de Rhodes
Les sirènes existent (1)
Les chanteuses grecques (3)
Tags : Lena Platonos, yperagora, martha frintzila, greek music, musique grecque, ελληνική μουσική, chanteuse grecque
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Commentaires
Et oui ! toute la vie en Grèce est rythmée par la religion ....
Par contre avec les plans d'austérité successifs personne ne s'est interrogé sur ce que coûtait l'Eglise à l'Etat ... Sujet tabou même pour les membres du FMI
J'ai l'impression que même si c'était dit, ça ne changerait pas la place qu'occupe l'Eglise dans l'esprit des Grecs. Le patrimoine grec est entre ses mains depuis si longtemps !
Certainement ! Car je me souviens des remous quand Papandreou a fait passer la loi sur le mariage civil en 1980 (à peu près) ....
Mais ça pourrait aider à relever les finances !
Le mariage civil ? C'est très récent, donc !
Quand je pense que le maire de Tilos (Dodécanèse) avait tenté un mariage gay (en 2008, je crois) ! Il y a eu une levée de bouclier assez rapide et tout a été oublié.
Très ! et en plus peu de couples se contentent de cette seule institution. Tout le monde va à l'église !
Ouais... c'est pour la fête aussi... J'imagine mal les Grecs en tristes grenouilles grisâtres de bénitier.Tu me diras qu'on peut faire la fête sans l'église, mais en Grèce, il y aurait peut-être moins de monde.
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Bonjour
merci pour ce partage
quand on voit le nombre d'églises et de chapelles en Grèce et dans le meilleur état, on comprend tout de suite sue l'église y est très présente
Bonne journée