• Kostas Karyotakis : Sommeil * Ύπνος

    vasilis-avramidis--untitled--2010.jpg

     

    Sommeil

    Nous fera-t-il cette grâce, le destin,
    de nous laisser enfin mourir – au bord
    du pays de nos pères ?
    Nous dormirons, heureux comme de petits enfants...
    Et fuiront au-dessus de nous, dans le ciel, les étoiles,
    et toutes choses de ce monde.
    Comme un rêve, la mer viendra nous caresser
    et comme la mer, notre rêve
    nous conduira dans des pays qui n'existent pas.
    Amours sera le vent dans nos cheveux,
    et tout sentira bon la respiration des algues.
    Sous nos larges paupières, sans même l'entendre,
    nous rirons.
    Et les roses quitteront les haies
    pour nous faire un doux oreiller
    et les rossignols, un à un,
    cesseront de se taire et diront le chant de la paix.
    Nous dormirons, heureux comme de petits enfants...
    Et les filles de notre village, tout autour de nous,
    se pencheront comme des poiriers sauvages,
    pour nous parler tout bas des cabanes
    toutes d'or, du soleil
    du Dimanche, de ses pots de fleurs blancs –
    et des belles années qui passent...
    Grand'mère nous tiendra la main,
    et comme nous mettrons du temps à nous endormir,
    elle nous racontera comme une légende, d'une voix blanche,
    l'amertume de l'existence. C'est alors que la lune
    viendra nous éclairer les pieds, c'est alors
    que nos yeux enfin se seront fermés, au bord
    du pays de nos pères – comme ceux d'enfants
    qui toute la journée se seront dépensés et auront pleuré,
    et qui maintenant dorment d'un profond sommeil.

     

    Ύπνος

    Θὰ μᾶς δοθεῖ τὸ χάρισμα καὶ ἡ μοῖρα
    νὰ πᾶμε νὰ πεθάνουμε μιὰ νύχτα
    στὸ πράσινο ἀκρογιάλι τῆς πατρίδας;
    Γλυκὰ θὰ κοιμηθοῦμε σὰν παιδάκια

    γλυκά. Κι ἀπάνωθέ μας θὲ νὰ φεύγουν,
    στὸν οὐρανό, τ'ἀστέρια καὶ τὰ ἐγκόσμια.
    Θὰ μᾶς χαϊδεύει ὡς ὄνειρο τὸ κύμα.
    Καὶ γαλανὸ σὰν κύμα τ'ὄνειρό μας
    θὰ μᾶς τραβάει σὲ χῶρες ποὺ δὲν εἶναι.
    Ἀγάπες θὰ 'ναι στὰ μαλλιά μας οἱ αὖρες,
    ἡ ἀνάσα τῶν φυκιῶν θὰ μᾶς μυρώνει,
    καὶ κάτου ἀπ' τὰ μεγάλα βλέφαρά μας,
    χωρὶς νὰν τὸ γρικοῦμε, θὰ γελᾶμε.
    Τὰ ρόδα θὰ κινήσουν ἀπ' τοὺς φράχτες,
    καὶ θὰ 'ρθουν νὰ μᾶς γίνουν προσκεφάλι.
    Γιὰ νὰ μᾶς κάνουν ἁρμονία τὸν ὕπνο,
    θ' ἀφήσουνε τὸν ὕπνο τοὺς ἀηδόνια.
    Γλυκὰ θὰ κοιμηθοῦμε σὰν παιδάκια
    γλυκά. Καὶ τὰ κορίτσια τοῦ χωριοῦ μας,
    ἀγριαπιδιές, θὰ στέκουνε τριγύρω
    καί, σκύβοντας, κρυφὰ θὰ μᾶς μιλοῦνε
    γιὰ τὰ χρυσὰ καλύβια, γιὰ τὸν ἥλιο
    τῆς Κυριακῆς, γιὰ τὶς ὁλάσπρες γάστρες,
    γιὰ τὰ καλὰ τὰ χρόνια μας ποὺ πᾶνε.
    Τὸ χέρι μας κρατώντας ἡ κυρούλα,
    κι ὅπως ἀργὰ θὰ κλείνουμε τὰ μάτια,
    θὰ μᾶς δηγιέται —ὠχρὴ— σὰν παραμύθι
    τὴν πίκρα τῆς ζωῆς. Καὶ τὸ φεγγάρι

    θὰ κατεβεῖ στὰ πόδια μας λαμπάδα
    τὴν ὥρα ποὺ στερνὰ θὰ κοιμηθοῦμε
    στὸ πράσινο ἀκρογιάλι τῆς πατρίδας.
    Γλυκὰ θὰ κοιμηθοῦμε σὰν παιδάκια
    ποὺ ὅλη τὴ μέρα ἐκλάψαν καὶ ἀποστάσαν.

                                                                       

    Traduction de Dominique Grandmont in
    37 poètes grecs de l'Indépendance à nos jours,
    P.J. Oswald, 1972.

      

    Κ. Καρυωτάκης, από τη συλλογή Νηπενθή, 1921

     

      Tableau en tête d'article de Vasilis Avramidis (sans titre), 2010.

    Le texte est dit ici en grec par le comédien Dimitris Horn :

     

    Video : japan88gr

     
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  • Commentaires

    1
    Dimanche 2 Décembre 2012 à 16:33
    Dornac

     

    Bonjour Oulipia !

    Je fais confiance aux traducteurs en général, je lis entièrement la traduction avant ou après avoir lu le texte original mais je ne regarde pas forcément dans le détail.

    Je vais me faire l'avocate du traducteur pour que tu me dises ce que tu en penses.

    Ici, je crois que Grandmont n'a pas voulu répéter l'idée de nous « faire un doux sommeil » qui est déjà quelques lignes au-dessus et le mot « harmonie » n'a je pense pas forcément la même signification que celle qu'on lui donne en français. Il l'a remplacé par « chant de la paix » ce qui permet de rappeler qu'ici sommeil=mort=paix. Ca évite aussi la lourdeur "nous faire un sommeil d'harmonie -ou harmonieux"

    Qu'en penses-tu ?

    2
    Dimanche 2 Décembre 2012 à 20:12
    Dornac

    Pour les strophes, c'est de ma faute : j'ai repris la disposition que j'ai trouvé pour le poème en langue originale et je l'ai appliqué à la traduction. Je vais corriger ça.

    Une fois réglé le problème des strophes, le sens ne me semble pas tellement différent entre ta version et la sienne.

    3
    Lundi 3 Décembre 2012 à 19:15
    Dornac

    Mais non mais non tu n'es pas grincheuse...

    Je suis d'accord pour qu'on ait des exigences. Pour l'instant, je suis en général satisfaite des traductions que je lis. Je n'ai peut-être pas encore un niveau suffisant en grec pour discuter âprement de ces traductions.

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    4
    oulipia
    Jeudi 18 Avril 2013 à 09:24
    oulipia

    Bonjour

     

    J'avoue que cette taduciton de D Grandmont me laisse un peu dubitative - par exemple,

    Γιὰ νὰ μᾶς κάνουν ἁρμονία τὸν ὕπνο,

    θ' ἀφήσουνε τὸν ὕπνο τοὺς ἀηδόνια 

    signifie, sauf avis contraire : "Pour nous faire un sommeil d'harmonie/ les rossignols quitteront leur sommeil".

    Bien sûr, un vrai traducteur "arrange" pour la beauté du résultat - mais de là à ne pas rendre ce que dit le texte d'origine - et à ne pas rendre non plus, dans le cas présent, le mouvement du poème - je trouve qu'il y a un grand pas... qu'il est, me semble-t-il, regrettable de franchir.

     

    Ce n'est bien sûr qu'n avis tout personnel. 

    5
    oulipia
    Jeudi 18 Avril 2013 à 09:24
    oulipia

    Ce n'est pas tant "harmonie", c'est le fait de ne pas garder une partie du sens des 4 vers :

    Les roses quittent les haies, et les rossignols quittent leur sommeil, les uns et les autres pour contribuer à "notre" sommeil à nous. Quand un poète choisit de répéter un mot, il faut respecter ce choix et ne pas alléger à sa place son style  - ou alors, on écrit un poème, on ne traduit pas le sien... (opinion perso, of course)

    La division en strophes telle qu'elle est là ne semble pas d'origine, le poème paraît être d'un seul bloc.

    Les 7 vers signifienτ  - selon moi :

     

    " Amours seront les brises dans nos cheveux,

    l'haleine des algues nous embaumera

    et au-desssous de nos vastes paupières

    sans nous en rendre compte nous rirons.

    Les roses s'arracheront aux haies

    et viendront nous servir d'oreiller.

    Pour nous faire un harmonieux sommeil,

    quitteront leur sommeil les rossignols."

     

     

     

    6
    oulipia
    Jeudi 18 Avril 2013 à 09:24
    oulipia

    ... Bah ce sont certes des nuances, mais tout dans ce genre de poèmes est affaire de nuances, justement - 

    De toute façon traduire est une choses désespérante et impossible, il n'y a jamais d'équivalence. On n'arrive qu'à de pâles reflets affadis... Raison de plus me semble-t-il pour chercher le plus possible le respect en tout, aussi bien du sens que des structures. Les traductions depuis le grec souffrent je crois du... manque de concurrence : si peu de gens connaissent la langue, si peu de versions différentes du même texte sont accessibles - cela ne favorise pas l'exigence et la rigueur, on voit souvent des versions avec des mots (voire des vers) allègrement omis - ce que nul sans doute n'oserait pour un texte traduit de l'anglais, de peur que "ça se voie". Je n'accuse pas ce traducteur-ci particulièrement, c'est une remarque générale.

    Il n'empêche que mieux vaut mettre en ligne des poèmes traduits... que rien du tout, bien sûr ! Ne vois pas dans mes grincheuses considérations quoi que ce soit de désobligeant envers ton blog, dont je suis une habituée.  

     

     

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