• Vassilis Tsitsanis a 100 ans * Βασίλης Τσιτσάνης

     

    Vassilis Tsitsanis a 100 ans

    Vassilis Tsitsanis est l'un des plus grands joueurs de bouzouki, musicien et chanteur de rébétiko en Grèce. Il aurait eu 100 ans aujourd'hui.

    Video : Thanos GR
    Taqsim (Ταξιμι) in hommage à Tsitsanis (1987)  

     

    Vassílis Tsitsánis (Βασίλης Τσιτσάνης), né le 18 janvier 1915 à Trikala, est le dernier d'une famille pauvre de 14 enfants dont le père, Kostas, fabriquant de pompons qui ornent les chaussures des evzones, joue à la mandoline des chansons presque exclusivement klephtes (κλέφτικα τραγούδια). À cet effet, il transforme bientôt sa mandoline en bouzouki en allongeant le manche. C'est donc enfant que Vassilis est sensibilisé à la musique, il prend des cours de violon, considéré comme plus noble. Vassilis devient rapidement virtuose et accompagne les films muets au cinéma « Panellinion ». Son père meurt en avril 1927, il n'a que 12 ans. 

     

    Vassilis Tsitsanis a 100 ans

    Il se concentrera alors sur cet héritage du bouzouki même si à l'époque l'instrument est encore assez méprisé et en apprend la technique seul. Il joue (secrètement pour éviter les remontrances maternelles) les morceaux de Vangelis Papazoglou, puis dès l'âge de 15 ans, il compose lui-même la plupart des morceaux qu'il interprète.

    Sur la volonté de sa mère, il commence des études de droit à Athènes en 1936 pour devenir avocat et continue la musique en jouant dans les tavernes pour gagner sa vie. Il se fait connaître et appeler «ο Βλάχος», «le Valaque» (dans le sens ici de «provincial»). Il rencontre le chanteur Dimitris Perdikopoulos et enregistre quelques premiers morceaux dès 1937 chez l'éditeur Odéon.


    Video : ResearcherXM
    Η μάγισσα της Αραπιάς (Αραπιά) - 1939  (Arabie)
    Paroles et musique V. Tsitsanis
    Ici aux côtés de Yorgos Dalaras en 1983

     

    Entre 1938 et 1940, Vassilis Tsitsanis demeure à Thessalonique, il y fait son service militaire dans la section des télégraphistes où il rencontre Charilaos Florakis (futur président du parti communiste grec, le KKE). Ce dernier a témoigné que même à l'armée, Tsitsanis disparaissait le soir pour aller jouer dans les tavernes du quartier de Kalamaria (port au sud de Thessalonique).

     


    Video: tragovouni5

    Ταγμα τηλεγραφητών (le télégraphiste)
    aux côtés de Perdikopoulos
    Paroles et musique V. Tsitsanis

     

    Il enregistre une centaine de chansons à la Columbia entre 1937 et 1940 grâce à un célèbre musicien rébète, Panos Toundas.

     


    Video : James D. Apessos

    Αρχόντισσα (Dame), 1939
    Paroles et musique V. Tsitsanis

     

    En 1940, il se marie à Zoe Samaras, puis quitte Thessalonique provisoirement pour Athènes puisqu'il y revient ensuite pour y trouver du travail. Il ouvre une « ouzerie Tsitsanis » avec son beau-père en 1942 à son retour de la mobilisation durant laquelle il avait été blessé au front. Entre-temps en effet, la guerre avait éclaté et à partir d'octobre 1940 le couple avait vécu séparé pendant six mois, Tsitsanis avait été enrôlé comme télégraphiste.

     

     

     

    Video : GetGreekMusic
    Μ' έναν αναστεναγμό (Ό,τι κι αν πω δε σε ξεχνώ), Avec un soupir, 1940
    Interprété ici par Grigoris Bithikiotsis
    Paroles et musique V. Tsitsanis

     

    Même si la plupart de ses chansons composées pendant la guerre n'ont été enregistrées qu'après celle-ci, une centaine de morceaux a pu exister sur vinyle avant que les Allemands, qui occupent la Grèce depuis avril 1941, n'imposent la fermeture des studios d'enregistrement. La dictature de Metaxas interdisait par ailleurs le rébétiko, considéré alors comme le chant des marginaux. Cette musique aux accents orientaux (le rébétiko fut importé d'Orient lors de la grande catastrophe de 1922 qui vit le retour des Grecs de Smyrne chassés par Atatürk) ne plaisait qu'à une minorité de personnes mais narguait la censure du dictateur.

    En 1943 il ébauche Συννεφιασμένη Κυριακή (synefiasmeni kyriaki, Dimanche nuageux) qui deviendra la chanson porte-drapeau des Grecs car elle évoque l'atmosphère lourde de l'Occupation de façon poétique.

     

     


    Video : platanistos

    Συννεφιασμένη Κυριακή (Dimanche nuageux)

     

     

    Συννεφιασμένη Κυριακή

    Συννεφιασμένη Κυριακή,
    μοιάζεις με την καρδιά μου
    που έχει πάντα συννεφιά,
    Χριστέ και Παναγιά μου.

    Όταν σε βλέπω βροχερή,
    στιγμή δεν ησυχάζω.
    μαύρη μου κάνεις τη ζωή,
    και βαριαναστενάζω.

    Είσαι μια μέρα σαν κι αυτή,
    που ‘χασα την χαρά μου.
    συννεφιασμένη Κυριακή,
    ματώνεις την καρδιά μου.

                                     

    Dimanche nuageux

    Dimanche nuageux
    tu ressembles à mon cœur
    toujours plein de nuages
    O mon Christ et ma Vierge !

    Tu es pareil au jour
    Où j'ai perdu ma joie
    Dimanche nuageux
    Qui fait pleurer mon cœur !

    De te voir si pluvieux
    M'interdit d'être heureux
    Noire tu as fait ma vie
    Et sans fin mon soupir

         
    Paroles et musique de
    Vassilis Tsisanis
      Traduction : Jacques Lacarrière
    in La Grèce de l'ombre

     

     

    C'est après la guerre que Tsitsanis arrive au sommet de sa carrière. En 1946, il retourne à Athènes et se produit dans les tsitsifies (tavernes du Pirée), il rencontre Sotiria Bellou (Σωτηρία Μπέλου), enregistre avec elle et d'autres chanteurs tels que Maríka Nínou (Μαρίκα Νίνου) et Pródromos Tsaousákis (Πρόδρομος Τσαουσάκης) ses chansons écrites pendant la guerre.

     

     

    Video : GetGreekMusic
    Μπαξέ-Tσιφλίκι (Baxe-Tsifliki), 1948
    Paroles et musique V. Tsitsanis
    Ici la chanson est interprétée aux côtés d'Eleni Gerani en 1981
    à la télévision (voir l'émission intégrale au bas de cet article).

     

    Pendant la guerre civile (1946-1949), certaines de ses chansons sont censurées : Ως πότε πια τέτοια ζωή (ospote pia tetoia zoi, Jusqu'à quand désormais une telle vie), Για μια κόρη ξελογιάστρα (gia mia kori xelogiastra, Pour une fille séductrice), Φτωχέ διαβάτη (ftoxe diavati, Pauvre passant), Κάποια μάνα αναστενάζει (kapia mana anastenazei, Une mère soupire).

     


    Video : asimvivastos1952

    Φτωχέ διαβάτη
    (Pauvre passant) avec Sotiria Bellou
    (1952)

     


    Vidéo : GetGreekMusic
    Για μια κόρη ξελογιάστρα (Pour une fille séductrice)

     

     

     

    Video: kleithron
    Ici aux côtés de Théodorakis, Tsitsanis interprète 
    Κάποια μάνα αναστενάζει (Une mère soupire)
    lors d'une soirée en son hommage en 1983.
    Paroles de Babis Bakalis (Μπάμπης Μπακάλης)
    Musique de Vassilis Tsitsanis (Βασίλης Τσιτσάνης)

     

     

    Les années 50 marquées par un style indien venu des films importés sont l'occasion pour Vassilis Tsitsanis de s'adapter sans se trahir lui-même.

     La preuve... vous le reconnaîtrez certainement dans la vidéo suivante :

     

     


    Video : Ultra Hindi

    Plus sérieusement, il s'agit d'une chanson indienne à la mode dans les années 50.
    Actrice : Nargis Dutt dans le film Chori Chori (1956) réalisé par Anant Thakur
    Chanteuse: Lata Mangeshkar, chanteur: Manna Dey

     

     

    Des années soixante jusqu'à sa mort il enregistre plus de 300 chansons avec les chanteurs à la mode. Il rencontre et collabore avec les plus grands musiciens de l'époque.

     

    Vassilis Tsitsanis a 100 ans * Βασίλης Τσιτσάνης

    De gauche à droite: Grigoris Bithikotsis, Vassilis Tsitsanis, Mikis Theodorakis

     

    Vassilis Tsitsanis a 100 ans * Βασίλης Τσιτσάνης

    De gauche à droite:  Vassilis Tsitsanis, Stelios Kazantzidis

     

    Vassilis Tsitsanis a 100 ans
    Romy Schneider (très connue pour son influence sur la musique grecque*) et Vassilis Tsitsanis 
    (en 1966, année du film 10h30 du soir en été de Jules Dassin avec Melina Mercouri ?)

     * meuh non ! Je plaisante...

     Il part faire une tournée au États-Unis en 1969 et lorsqu'il revient, joue fréquemment avec Yannis Papaïoannou jusqu'à la mort de celui-ci en 1972.

    Son dernier disque boucle une production extrêmement prolifique et sort en 1980 sous le titre de Harama.

    Tsitsánis meurt le 18 janvier 1984 à Londres à 69 ans jour pour jour d'un cancer du poumon. Il a écrit plus de 1000 chansons, modernisé le rébétiko et a ouvert, tout comme Manos Hadjidakis, la voie de la musique entechno (musique qui fusionne tous les genres, rock, jazz, classique, démotique, variété et rébétiko).

    Vassilis Tsitsanis a 100 ans * Βασίλης Τσιτσάνης

     

    Devenu une légende du rébétiko, il a reçu des funérailles nationales.

    En France, l'Académie de Musique Charles Cros lui décerne un prix
    posthume en 1985 pour l'album « Hommage à Tsitsanis ».

     

     

     

     

     Extrait d'une émission française (1973) :

     


    Video : zZMIKE
    C'est Sotiria Bellou qui chante au début.
    Les commentaires sont peut-être de Mikis Thédorakis.

     

    Une émission grecque sur la ERT diffusée en 1981 :

     


    Video : KronosAgrinio 
    Vassilis Tsitsanis aux côtés d'Eleni Gerani

     

    Un certain nombre d'hommages lui sont rendus par les musiciens et chanteurs grecs depuis l'année dernière, trentenaire de sa mort. Les hommages continuent donc cette année pour le centenaire de sa naissance.
    Arvanitaki, Galani et Xarchakos applaudi lors de leur hommage à Tsitsanis :

     


    Video : glauxath

    Sources :

    Eleni Cohen : Rébètiko, un chant grec
    Jacques Lacarrière, Michel Volkovitch: La Grèce de l'ombre

    Liens / Links

    Le site de Tsitsanis : tsitsanis.gr

    Michel Volkovitch : L'adieu à Tsitsanis

    Blog d'Eleni Cohen sur le rébétiko

     Tsitsanis sur ce blog :
    *Tsitsanis, la musique écrit l'histoire
    *Tsitsanis dans la jungle (ici allez voir aussi les commentaires de Pascal, riches en références)
    *Tsitsanis : Ingrate

     

       

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  • Commentaires

    1
    Dimanche 18 Janvier 2015 à 20:00

    Presque tous les joueurs de bouzouki de cette époque venaient de milieu très populaire. Dans les milieux bourgeois on préférait jouer du piano.

    2
    Dimanche 18 Janvier 2015 à 21:04

    Oui, mais la famille de Tsitsanis espérait qu'il accède à la bourgeoisie et c'est pour ça qu'on l'a obligé à faire du violon (et des études pour être avocat). Il a repris le bouzouki de son père à sa mort mais il se cachait pour en jouer.

     

    3
    Vendredi 20 Février 2015 à 23:18

    Oui, c'est bien la voix de Theodorakis que l'on entend : reconnaissable entre toutes !

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