• Adults in the room, un film de Costa Gavras, 2019

    Adults in the room de Costa Gavras, 2019

     

    Merci à Costa Gavras qui a choisi de traiter la crise en Grèce à partir de l'ouvrage de Yannis Varoufakis : j'ai eu l'impression de revivre pas à pas la même vision que j'avais à l'époque des soubresauts des négociations sur la dette grecque, en 2015. D'accord, c'est un parti pris, mais il est d'une grande véracité car à l'époque, les journaux déblatéraient tant d'inanités sur la Grèce qu'ils trahissaient alors le discours dominant, les entourloupes, et, de la part des journalistes, leur ignorance du pays et leur servitude au facho-libéralisme ou stalino-libéralisme (cette dernière expression leur étant moins plaisante que la première, j'aime l'utiliser).

     

    Adults in the room de Costa Gavras, 2019

     

    On retrouve donc dans ce film les Karaghiozis psycho-rigides du théâtre d'ombres européen avec leurs certitudes et leur incapacité à penser autrement. Étonnement, Christine Lagarde est croquée en demi-teinte, en chatte faussement assoupie qui guette d'un œil plus ouvert que les autres, mais Wolfgang Schäuble (union des chrétiens démocrates allemands, nommé à l'époque ministre fédéral des Finances d'Allemagne et favorable au Grexit) est dénoncé comme une pasionaria du remboursement de la dette, un homme très âpre, calculateur, à la mégalomanie et la colère rentrées: on croit voir Peter Sellers dans Docteur Folamour. Tous les autres personnages de la commission européenne sont ridiculisés par leur instinct grégaire et, selon Varoufakis, leur ignorance de l'économie.

     

    Adults in the room de Costa Gavras, 2019

    Daan Schuurmans (Jeroen Dijsselbloem) et Josiane Pinson (Christine Lagarde)

     

    Les enfantillages des Eurocartes font dire à Christine Lagarde : « we need adults in the room », à l'époque, je pensais qu'elle insultait Varoufakis, mais il semble qu'il l'ait interprété (ou réutilisé) autrement...

    Pour résumer : le remboursement de la dette fait de la Grèce un pays éternellement endetté.
    On comprend que piller la Grèce est destiné à remplir les banques françaises et allemandes, les entreprises n'ont plus qu'à se servir en rachetant la Grèce à bas prix.

     

    Adults in the room de Costa Gavras, 2019

     Christos Loulis (Yannis Varoufakis) et Alexandros Bourdoumis (Alexis Tsipras)

     

    Conçu comme un thriller, le film est cependant très technique, il faut donc se préparer à être attentif aux différentes étapes de la négociation, où l'on voit les stratégies des Eurocrates les plus variées : technique du bourrin colonialiste sans égard pour l'autre, harcèlement, bizutage, lynchage médiatique, technique de l'alternance du gentil et du méchant bourreau jusqu'aux stratégies d'un niveau de bassesse égal à celle des escrocs ordinaires : on fait, par exemple, lire à Varoufakis un accord acceptable qui, à la signature, s'est transformé en accord en total opposition avec l'autre, on feint l'étonnement quand Varoufakis dévoile la duplicité, lui-même feignant de croire à une mauvaise entente au sein de l'Europe 1. Le président de l'Eurogroupe (Jeroen Dijsselbloem) est vu comme un pantin mécanique, locomotive du rouleau compresseur, qui ne redevient humain qu'en étant phallérique 2.

     

    Adults in the room de Costa Gavras, 2019

      Christos Loulis

    Le fragile Alexis Tsipras, qui a soutenu Yannis Varoufakis jusqu'au référendum, se laisse pourtant abattre par les Eurocrates malgré la victoire du « non » au referendum sur le Memorandum, son coup de maître, car on a compris à ce moment-là, de manière très concrète, que l'Europe n'était plus une démocratie.

     Adults in the room de Costa Gavras, 2019

     Christos Loulis

    Dans l'ensemble, on reconnaît les différents acteurs, même physiquement : l'acteur principal est formidable (Christos Loulis dans le rôle de Yannis Varoufakis), on est ravi de voir à l'écran Aurélien Recoing (dans le rôle du savonneux Moscovici) et on découvre que la belle actrice italienne francophone Valeria Golino (dans le rôle de la femme de Varoufakis) parle aussi le grec.
    Cette ressemblance à l'original produit un effet comique et on croise les pantomimes de Macron (fusillant Hollande dans son dos), Mario Draghi (ex- Goldman Sachs, président de la BCE), Jean-Claude Junker (président de la Commission européenne depuis 2004) marchant à petit pas de pingouin, etc.

    Enfin, on admire avec quel brio et quelle force Yannis Varoufakis, seul contre tous, ne s'est ni laissé enfumer ni laissé écraser par la morgue eurocrate.

    « Le Monde » indique que le film a été mal reçu par les Grecs, or, d'une part il y a très peu de salles de cinéma en Grèce – on diffuse donc préférentiellement les merdes américaines –, d'autre part, le pouvoir aujourd'hui (depuis juin dernier) est détenu par la Nea Demokratia, parti politique qui fut hautement corrompu et à l’origine, avec le parti socialiste (Pasok), de l'effondrement de la Grèce : comment pourrait-on avoir un accueil critique favorable à ce film dans de telles circonstances de retour à l'omerta ? On savait depuis longtemps que Tsipras quitterait le pouvoir car comment pouvait-il se faire réélire après avoir cédé aux Eurocrates ?

    Le combat n'est donc pas terminé.

     

    1 On ne s'étonne pas des perfidies des socialistes français dans ce témoignage car on sait qu'Hollande est l'incarnation de la corruption idéologique de ce parti qui avait déjà entériné le déclin de la puissance française alors qu'il aurait dû se battre en défendant la fonction publique, en particulier la médecine ou la recherche scientifique française, domaines autrefois rayonnants dans le monde : maintenant les brillants chercheurs français partent à l'étranger. Les « bienfaits » du libéralisme sont réservés à quelques individus et non à des nations, mais il paraît que nos hommes politiques sont « responsables ». Irresponsables quand ils sont au pouvoir et donc responsables de la situation déclinante de la France, ils sont historiquement une nouvelle génération de rois fainéants évincés par les maires du palais.

    2 Phallérique – je sais que ce mot n'existe pas puisque je viens de l'inventer : il désigne les hommes hystériques.

     

     

     Distribution : 

    Christos Loulis
    Valeria Golino
    Alexandros Bourdoumis
    Aurélien Recoin
    Josiane Pinson
    Daan Schuurmans
    Ulrich Tukur
    Vincent Nemeth

     

     

    Yannis Varoufakis, économiste et ministre des finances en 2015
    Danae Stratou, femme de Yannis Varoufakis

    Alexis Tsipras, premier ministre grec
    Pierre Moscovici
    Christine Lagarde, présidente du FMI

    Jeroen Dijsselbloem, président de l'Eurogroupe
    Wolfgang Schäuble, ministre des finances allemand
    Michel Sapin, ministre des finances français

     

    et de nombreux autres acteurs grecs...
     

     

    Liens / Links

     

    Sur la crise grecque :

    Debtocracy (la gouvernance par la dette), film documentaire (par les mêmes journalistes du documentaire Catastroïka)

    Catastroïka.com : le site du documentaire
    Debtocracy : le site du documentaire

    Voir également, sur la crise grecque, dans ce blog :

    La Grèce ne doit pas rembourser une dette ODIEUSE

    Le syndrome du larbin

    Catastroïka, privatiser pour mieux régner (documentaire sur la crise grecque)

    Pas de liquide

    Changez tout * Les indignés grecs Αγανακτισμένοι 15/06/2011

    À propos de la Grèce

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  • Commentaires

    1
    Mercredi 27 Novembre 2019 à 08:50

    Καλημέρα! Είδα την ταινία και προσυπογράφω κάθε σας λέξη...

      • Mercredi 27 Novembre 2019 à 19:51

        Καλημέρα Παναγιώτα,
        Ευχαριστώ για την δική σου μαρτυρία

      • Mercredi 27 Novembre 2019 à 21:44

         

        Συγνώμη : η δική ΣΑΣ μαρτυρία

         

    2
    lizagrece
    Mercredi 27 Novembre 2019 à 09:22

    Plusieurs points sur lesquels je ne suis pas d'accord bien entendu. Varoufakis est sorti du jeu politique et n'a pas même tenté à cette époque de tenter une élection de député. Il a été à partir de sa démission à l'étranger. Pendant ce temps là Tsipras est resté à gouverner le pays en essayant de colamter les brèches. 

    Quant au cinéma dire que les Grecs préfèrent des conneries américaines est faux. Il y a du cinéma de tous les pays sur les affiches et aussi du cinéma Grec. Si les Grecs boudent ce film c'est aussi parce qu'ici Varoufakis a mauvaise presse. Le 17 Novembre  Tsipras était à la manifestation devant l'Ambassade des USA en mémoire des évènements de Polytechinique. Varoufakis pas. Et dans le cortège derrière Tsipras il y avait beaucoup de monde. 

    Non la lutte n'est pas terminée en effet. Mais il ne faut pas perdre de vue que tout le monde voulait faire chuter le gouvernement SYRIZA. Dès le début. Ils ont mis 4 ans à en venir à bout et Mitsotakis est en train de détricoter tout ce qui avait été fait : sur la politique sociale, le statut des réfugiés, la santé, le droit du travail, le droit constitutionnel. Ce qui est dommage c'est que la gauche Française a contribué en faisant de Tsipras un traitre à sa chute et à la mise en place de ce gouvernement qui est un des plus durs de droite que je n'ai jamais connu depuis  2006. 

      • Mercredi 27 Novembre 2019 à 19:43

        Merci pour ce long message, Liza.

        Je n'ai pas dit que les Grecs préféraient les "merdes américaines", j'ai parlé des diffuseurs. Si les diffuseurs pensent qu'une merde américaine" marchera mieux qu'un autre film, ils décident de le mettre dans plus de salles. Ce sont les diffuseurs qui décident. D'ailleurs, à Paris, on remarque que ce film est peu diffusé. Donc, les diffuseurs, qui ont un parti pris, sont les principaux responsables d'un échec commercial. Ils donnent ou non à un film la chance d'être vu par les gens.

        Pour ce que tu dis sur "la gauche Française a contribué en faisant de Tsipras un traitre à sa chute et à la mise en place de ce gouvernement", je ne suis pas au courant de cette contribution et je serais intéressée de savoir comment. Ça ne m'étonnerait pas tellement car dans le film on voit la duplicité du jeu français : Michel Sapin dit "blanc" à Varoufakis et "noir" à la presse, Moscovici fait lire un "contrat agréable" à Varoufakis, et le vrai contrat qu'il doit signer est à l'opposé : nos hommes politiques ont depuis longtemps pour modèle "Super menteur".

        Enfin, je sais que Varoufakis suscitait la suspicion mais ce qui est dit dans le film (et dans le livre) montre avant tout l'horreur du fonctionnement et de la mentalité de l'Union européenne, une union qui aurait pu être tout sauf fasciste, or on se pose la question : comment la démocratie a-t-elle pu être abolie si facilement ? Peu s'en sont rendus compte...

        Comment la gauche pourra-t-elle un jour se sortir de cette mélasse et permettre aux peuples de retrouver la possibilité de vivre dignement sans être inquiétés de l'avenir ?

         

      • Mercredi 27 Novembre 2019 à 20:03

        ... et je pense sincèrement que l'idée de Tsipras de faire un referendum était un coup de génie : il a gagné sur deux tableaux, celui du soutien populaire (provisoire) et celui de l'Histoire pour laquelle on a donné la preuve que l'Europe n'était plus une démocratie, plus personne ne peut l'ignorer... et ce, même si Tsipras a fléchi après.

    3
    Gardenia
    Mercredi 27 Novembre 2019 à 23:13

    Bravo ! Je n'ai pas encore vu le film, "Ενήλικοι στην Αίθουσα" mais la présentation, l'analyse, la critique et les commentaires qui en sont faits ici vont être un bon support pour une  compréhension plus réfléchie. Un grand merci donc !

    4
    O Melissokomos
    Lundi 9 Décembre 2019 à 14:16

    La manière de raconter l'Histoire de Varoufakis reprise par Gavras est TRÈS Contestable pour ne pas dire plus comme le souligne Zoé Kostantopoulou (ancienne présidente du parlement sous Tsipras) dans sa lettre ouverte à Costa Gavras. Les Grecs, pas dupes, savent mieux ce qu'il en est.                                                                                                           

      • Mercredi 11 Décembre 2019 à 19:04

        Quelle est la version de Zoé Kostantopoulou ? Avez-vous des liens vers l'article ?

        Ce n'est pas étonnant que les soutiens de Tsipras soient outrés puisque Tsipras est décrit comme ayant trahi les Grecs. Ce qui n'est pas totalement faux, avouons-le et cela explique que Nea Democratia soit au pouvoir maintenant. En effet, les Grecs ne s'y sont pas trompés... en ne votant pas, car Nea Democratia, élue par défaut grâce aux abstentions, c'est "l'ancien régime", celui qui a entraîné la Grèce dans la crise.

    5
    O Melissokomos
    Jeudi 12 Décembre 2019 à 08:54

    Bonjour,

    voici le lien pour accéder à la lettre ouverte de Zoé Kostantopoulou à Gavras :

    https://blogs.mediapart.fr/patrick-saurin/blog/151019/lettre-ouverte-de-l-ex-presidente-du-parlement-grec-au-cineaste-costa-gavras

    J'espère que vous pourrez l'ouvrir.
    Cordialemenr.
    A.T.

      • Jeudi 12 Décembre 2019 à 12:53

        Merci beaucoup, cette lettre est très intéressante, mais elle n'est pas un soutien à Tsipras, contrairement à ce que je croyais. Je me souviens de ce combat pour l'annulation de la dette, j'ai moi-même mis des liens sur ce blog vers cette proposition. Ce qui m'intéressait dans le film, comme je le dis dans mon article ci-dessus, c'est la dénonciation du comportement arrogant et tyrannique des Eurocrates, c'est le dévoilement de ce qu'est l’Europe aujourd'hui : une entité anti-démocratique au service des puissances financières.
        C'est très bien de rappeler que l'option de l'annulation de la dette a été occultée pendant les négociations par Varoufakis et Tsipras. Le résultat du referendum était favorable à cette option, il portait cette idée et je suis surprise de voir que Varoufakis et Tsipras auraient souhaité, selon Zoé Konstantopoulou, que le résultat soit "oui" au memorandum et non pas "non" comme cela s'est produit, pour accepter le memorandum "au nom du peuple".
        Mais peut-être que finalement Costa Gavras montre un peu cet aspect : dans le film, lorsque le memorandum a été refusé au réferendum, Varoufakis est assis à table avec sa femme et des collaborateurs et la population grecque arrive silencieuse autour de la table. N'était-ce pas pour rappeler leur trahison face à la puissante et écrasante volonté du peuple que Tsipras et Varoufakis n'auraient pas su contenter ?

        Merci encore, je me permets de copier/coller cette lettre ici :

         

        Le 10 septembre 2019

        Lettre ouverte à Costa-Gavras

        Cher Monsieur Gavras,

        Comme j’ai eu l’occasion de vous le dire de vive voix fin mai 2015 à Paris, j’apprécie et je respecte votre travail et votre contribution. C’est pourquoi, en juin 2015, en tant que Présidente du Parlement grec, je vous avais demandé de soutenir le rapport de la Commission d’audit du Parlement pour la vérité sur la dette grecque. À l’époque, vous m’aviez demandé de vous envoyer le rapport et quelques jours plus tard vous aviez été un de ses premiers signataires. C’est-à-dire que vous aviez soutenu le travail scientifique officiel de juristes, économistes et experts de renommée internationale, qui ont travaillé bénévolement pendant des mois et qui ont analysé les raisons pour lesquelles la prétendue dette publique du pays est illégale et ne devrait pas être payée par le peuple grec.

        Au travers de cette lettre ouverte, je voudrais que mes doutes soient rendus publics.

        Vous avez choisi de réaliser un film en référence à une période extrêmement importante de l’histoire récente de notre peuple et de notre pays. Une période que certains d’entre nous ont vécue depuis nos positions à responsabilité et que tout notre peuple a vécue de la manière la plus intense qu’il soit. Et vous l’avez fait en adoptant intégralement la version et le récit (véritablement le scénario) d’un homme qui a joué un rôle déterminant à cette période. Cet homme qui se comportait au moins de manière irresponsable et inconsciente dans la gestion de la négociation, la traitant comme une affaire personnelle, suivant une stratégie et des tactiques personnelles, négociant sans conseillers juridiques et sapant de sérieuses opportunités pour notre pays (qui existent toujours), en créant des chaînes et en attachant la Grèce au char du Troisième mémorandum, avant même d'avoir finalisé son premier mois au ministère des Finances.

        J’ai vécu ces événements critiques et cela m’a conduite à des conclusions qui, du moins selon moi, sont assez claires sur le rôle que chacun des protagonistes de l’histoire a eu. En effet, depuis la place que j’ai occupée, j’ai pu avoir une connaissance directe et sûre de ce qu’il s’est passé. Et sans demander que vous adoptiez ma propre position et lecture des événements, je m’interroge sur le fait que vous n’avez pas tenté de contre-interroger les événements de cette période. Votre film ne porte pas sur un pays fictif, mais sur des événements historiques qui ont marqué la Grèce et les Grecs et sur le rôle joué par ceux qui ont géré le sort de ce pays.

        Une lecture de l’histoire montrant ce qui s’est passé en 2015 comme le résultat unique du comportement extrême des créanciers et qui montre que le gouvernement grec était incapable de se défendre et de réclamer ses droits est une fausse lecture. Les créanciers se sont comportés de manière criminelle, impitoyable, qui rappelle un coup d’État. C’est un fait. Malheureusement, le gouvernement grec et ceux qui avaient la responsabilité des négociations (avec les créanciers) leur ont facilité la tâche. Ils ne s’étaient pas préparés, leur travail était brouillon et superficiel. Et si certaines personnes pensent qu’elles ont capitulé parce qu’elles n’étaient pas préparées, ma conviction, basée sur les faits que j’ai vécus, est qu’elles ont choisi de ne pas se préparer car elles avaient accepté de capituler. Cela a été très clairement confirmé quand elles ont choisi de ne pas utiliser le travail qui était fait au Parlement à cette époque et les outils de négociation spécifiques produits par ce travail.

        Dans le cadre des négociations de 2015, le gouvernement Tsipras, contrairement à ses engagements, n’a jamais soulevé la question de l’annulation de la dette, n’a pas non plus remis en question son remboursement, mais au contraire l’a accepté avec l’accord du 20 février signé par M. Varoufakis avant que ne commence les travaux du Parlement. Avec ce même accord, le gouvernement grec a cédé 11 milliards d’euros aux créanciers, ce qui était contraire à ses engagements et son programme. En réponse à mes réactions sur cet accord, Tsipras et Varoufakis ont fait semblant de ne pas comprendre. Ils n’ont pas suspendu le remboursement de la dette ni au commencement des travaux de la Commission d’audit du Parlement pour la vérité sur la dette grecque, bien qu’ils s’étaient engagés à le faire. Ils n’ont pas non plus utilisé le rapport de la Commission d’audit, ni au moment le plus crucial des soi-disant négociations au mois de juin.

        Lorsque le Parlement a approuvé le référendum, M. Varoufakis a tenté de l’inverser en déclarant que « si la proposition des créanciers change, la question changera et le gouvernement fera campagne pour le Oui », en même temps que M. Dragasakis [1] disait que le referendum pouvait ne pas avoir lieu. J’ai dû faire une déclaration publique depuis le Parlement, selon laquelle le référendum n’était pas annulé et que la question n’était pas modifiée, pour faire cesser ces déclarations.

        Il est maintenant clair que Tsipras et Varoufakis pensaient que le peuple grec voterait « Oui » lors du référendum, et envisageaient d’utiliser ce « Oui » comme alibi. C’est pour cette raison que Varoufakis a démissionné le 6 juillet 2015, peu de temps après le Non du référendum, et qu’il a ensuite facilité la trahison du Non : il n’a pas justifié sa démission, il a envoyé une lettre de soutien à son successeur Tsakalotos, et sa procuration pour l’accord à venir du 13 juillet – le 3e mémorandum, il a voté en faveur des conditions préalables à l’application du 3emémorandum, notamment la réforme du Code de procédure civile, qui permettait de faciliter la saisie des avoirs des citoyens par les banques en faillite. Tout cela a été fait par choix et non par manque de choix.

         Je considère que c’était une erreur de choisir de baser votre film, qui traite d’événements historiques d’une telle importance, uniquement sur le récit d’un homme, alors qu’il est clair qu’il s’est préoccupé de manière très systématique à l’écriture d’un scénario centré sur son propre personnage héroïque, qu’il ne s’est pas préoccupé à ce point, autant qu’il aurait dû, de soutenir notre pays et notre peuple, et qu’il continue de ne pas vouloir donner d’explications sérieuses sur de nombreux événements et sur ses propres actions.

        Bien sûr, en tant qu’artiste et même en tant que Costas Gavras, vous avez la liberté et le droit de créer comme vous le voulez ce que vous voulez. Mais je ne pense pas que vous ayez le droit de présenter unilatéralement, en adoptant le point de vue d’un des responsables et d’une des personnes impliquées, des événements historiques d’une telle importance.

        D’après le scénario de M. Varoufakis et de M. Tsipras, il n’aurait pas pu en être autrement pour la Grèce.

        Moi je sais qu’il aurait pu et qu’il peut en être autrement.

        Et la responsabilité de ceux qui n’ont pas voulu faire ce qu’il fallait et ce qu’ils s’étaient engagés à faire, ne diminue pas par l’effacement de la douleur de ceux qui ont fait face.

        Leur responsabilité n’est pas diminuée, même avec votre film.

        Respectueusement,

        Zoé Konstantopoulou

        Ancienne Présidente du Parlement

        Source : https://www.freedomtv.gr/post.php?p=225

    6
    Jeudi 12 Décembre 2019 à 12:58

    Si vous avez le temps (1h), il y a une vidéo de Melenchon sur Zoe Konstantopoulou :

    https://melenchon.fr/2016/02/05/pas-vu-a-la-tele-ep-1-la-situation-en-grece-zoe-konstantopoulou/

    Une voix qui n'a que très peu été entendue, en effet...

    Elle parle notamment du machisme en politique, qui explique aussi ce rejet de son point de vue.

    Ensuite (à 18 minutes environ) elle réexplique les conditions du memorandum.

    À 29'25 et surtout 30'15 pour l'organisation du referendum : sur la "révolution citoyenne en Europe" déclenchée par la Grèce avec le referendum. Zoé Konstantopoulou rappelle comment elle a déclenché l'audit sur la dette qui a terrorisé les biens pensants de l'économie et dressé le miroir de ce qu'ils sont vraiment : un soutien aux escrocs, des criminels en col blanc.

     

    7
    O Melissokomos
    Jeudi 12 Décembre 2019 à 15:23

    Je viens de regarder la vidéo que je ne connaissais pas.

    Mme Konstantopoulou est une personne remarquable : belle humanité, lucidité, hauteur de vue, rigueur et résistance. Nous manquons en France de personnalités politiques de cette trempe.

     

      • Jeudi 12 Décembre 2019 à 17:53

        Oui, elle semble solide et on sent l'admiration de Mélenchon dans la vidéo.

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